Monsieur le Ministre,

Depuis le débat d’actualité que nous avons eu la semaine dernière, de nombreux éléments nouveaux sont apparus dans les médias tant à propos de la survenance de la peste africaine en Wallonie que de la gestion de la crise proprement dite.
En ce qui concerne la gestion de la crise : pourriez-vous faire le point sur le cadre légal de la gestion de la peste porcine africaine? Vous nous avez expliqué qu’un groupe d’experts intégrant des représentants de l’UE et des autres entités du pays avait été mis sur pied pour anticiper et gérer la crise. Pourriez-vous nous dire depuis quand ce groupe d’experts est actif, quelle en est sa composition et quelles sont ses recommandations, en particulier à l’attention de la Wallonie ? Il est question de décliner en Wallonie les mesures de gestion de la crise adoptées en Tchéquie. Or, les densités de sangliers sont bien plus importantes chez nous. Est-ce que cela ne commande pas des mesures complémentaires ou différentes de celles adoptées en Tchéquie ?
Il ressort d’un document de la FAO portant sur la préparation des plans d’intervention contre la peste porcine africaine que la délimitation d’un zonage perd toute effectivité faute de barrières géographiques et de postes de contrôles internes sécurisés avec des inspecteurs qualifiés des services vétérinaires. Ce même document expose que le seul moyen d’éradiquer la maladie repose sur l’abattage des bêtes infectées ou susceptibles de l’être et ce moyennant, des méthodes qui évitent la propagation du virus (pièges multi-captures, par exemple). Quelles sont les mesures prises en vue de sécuriser le périmètre ? Quels sont les prélèvements qui ont été décidés à l’intérieur de ce périmètre, mais également en-dehors ? Ainsi, à ce jour, y a-t-il des recommandations pour les zones entourant le massif d’Herbeumont ? Comment le risque d’une extension de l’épidémie aux massifs de Libin, Ciergnion, etc.. est-il circonscrit ? Existe-t-il d’autres épicentres de la maladie ?
En ce qui concerne les suspicions d’importations, illégales, de suidés : avez-vous reçu le résultat des premiers tests ADN réalisés sur les carcasses d’animaux atteints ? Quels en sont les résultats ?

Est-ce que la décision de votre Collègue du fédéral d’abattre 4000 porcs d’élevages résulte également du groupe d’experts précité ? Quel est le sens de cette mesure si la réelle source du virus, les sangliers, n’est pas également exterminée sur la zone ? Quelle est la méthode d’abattage choisie au vu de ce que préconisent la FAO et l’EFSA ? Quelle concertation a-t-elle eu lieu entre le fédéral et le Gouvernement wallon ?

Quelles sont les concertations avec le secteur ? La FWA s’est dit surprise de cette mesure, car elle n’a pas été concertée et les conséquences sont lourdes. Les indemnisations tiendront-elles compte des conséquences à long terme pour les éleveurs bio, dont les certifications doivent attendre deux ans ? Y a ura t il perte de certification pour eux ? Les impacts ne sont-ils pas différents pour les élevages de qualité différenciée, bio, porc plein air ? Ne faut-il pas prévoir un traitement différent pour ces élevages, tant en termes de mesures d’abattage que d’indemnisation ?
En ce qui concerne la survenance de la crise, les questions restent nombreuses :
Il y a, d’abord, la gestion de la crise : il a été question, dans les médias, de recommandations, déjà anciennes, émanant notamment de l’AFSCA, évoquant la nécessité de diminuer les densités de gibiers. Est-ce exact ? De quand datent-elles ? Quelles mesures d’exécution avez-vous prises à cet effet ? Une décision de réduire les densités sans restriction de gibier a été prise en août, un arrêté à l’examen annoncé début septembre : où en est-il ? Etiez-vous informé de ces mesures de prévention ? Les avez-vous respectées ?

Plus largement, nous savions que la PPA était à nos portes depuis longtemps déjà. Quels sont les plans de crises que votre administration a élaboré dans le cadre de son contrat d’administration ? Est-ce que des mesures telles que la réduction des densités de sangliers par des plans de prélèvements, encadrés par le DNF, et la suppression du nourrissage artificiel ont figuré parmi ces mesures ? Dans l’affirmative, pourquoi n’ont-elles pas été suivies d’effets ?

Nous savons que le nourrissage artificiel en ce qu’il génère des interactions entre les sangliers doit être évité et donc, interdit. Or, des voix se sont exprimées een faveur du nourrissage et de son effet bénéfique sur la « fixation » des bêtes sur le territoire en cas de peste porcine. Confirmez-vous cette analyse ? A priori, elle semble contredire la recommandation du groupe d’experts européen et de la FAO qui l’interdit dans la zone infectée même. Comment résolvez-vous cette contradiction ?

On doit ensuite revenir sur les origines de la PPA en Wallonie. Avez-vous été informé par l’EFSA et l’AFSCA des mesures de contrôles sur les importations alimentaires de pays où règne la PPA. Dans la négative ou le doute, quelles sont les mesures que vous avez décidées avec le fédéral ou le groupe d’experts de l’UE pour éviter ces contaminations ?

En ce qui concerne le contrôle des parcs à sangliers en Wallonie et de la nourriture qui y est distribuée : les médias ont mis en évidence une autre source de contamination par le fait de l’homme et de la nourriture infectée, au travers de l’exemple du parc à sangliers de Monsieur Guy Maréchal.

Est-il exact que Monsieur Maréchal a bénéficié d’un non lieu et dans l’affirmative, pour quels motifs ? Est-il exact qu’il a bénéficié d’indemnités pour la suppression de ses bêtes ? Y a t-il eu un jugement ou s’agit-il d’une transaction ? Quel a été le montant des indemnités payées ? Pourriez-vous transmettre au Parlement une liste de tous les PV dressé par votre administration à l’égard de G. Maréchal et leur suivi.Quels sont les suivis qui ont été donnés par le Parquet ? Ne pensez-vous pas que l’existence même d’un tel parc, indépendamment de tout élevage, laisse à supposer des lâchers récurrents de sangliers sur le territoire de chasse de Monsieur Maréchal ? Il y a aussi la question de sa location de chasse publique : comment se fait-il que cette personne ait pu bénéficier d’un bail de chasse alors qu’il été verbalisé à de nombreuses reprises.

Existent-ils d’autres parcs à sangliers, « personnels » ou d’élevage jouxtant des territoires de chasse ? Si oui, quels contrôles sont exercés de manière à éviter des nourrissages à partir de déchets ou de farine de porcs infectés ainsi qu’à empêcher des lâchers de gibier illégaux ?

Il y a, encore , le contrôle des importations de sangliers. Dans l’actualité, il a été question de témoignages, sous couvert d’anonymat, d’importations de sangliers, d’une étude scientifique française établissant des flux de sangliers venant de l’est vers l’ouest, mais aussi de France où les parcs à sangliers ne sont pas interdits et d’Espagne, de rapports scientifiques, commandés par la Wallonie, établissant la présence irréfutables sur notre territoire de sangliers non wallons.

Sur la base de ces derniers rapports, vous étiez interrogé, il y a tout juste un an, sur l’existence de sangliers « polonais ». Vous répondiez alors qu’ « Il est évident que le DNF et l’UAB sont très attentifs à ce genre de dérives qui, si elles étaient confirmées, seraient fort dommageables tant pour l’agriculture que la biodiversité et l’éthique même de la chasse. Des opérations spécifiques pour la surveillance des activités nocturnes en général, en forêt ou à proximité de celles-ci, sont menées régulièrement, mais il est particulièrement difficile d’optimaliser ce genre de procédure sans indices ou renseignements préalables ».

Quelles sont les opérations que vous avez demandé d’organiser, dans la foulée de votre réponse, par vos services, DNF et UAB ? En particulier, depuis les conclusions des rapports de l’UCL de 2014 et 2017, cités dans les médias ? Vous n’envisagiez que les lâchers nocturnes, mais avez-vous envisagé les lâchers de jour ? Quels sont les résultats de ces surveillances ? Il existe des méthodes plus performantes pour identifier l’origine des sangliers que celle développée dans l’étude de l’UCL, pourquoi au regard des premiers résultats n’avez-vous pas envisagé de renforcer ces analyses ?

Ensuite, je reviens sur les PV en matière de chasse. Vous avez dit en plénière que vous demandiez les PV dressés depuis 10 ans : quelle est la réponse des autorités judiciaires à votre demande ? Confirmez-vous l’absence de PV ces 10 dernières années que ce soit en matière d’élevages de sangliers, de nourrissage illégal de sangliers, – entre autres via la technique des champs qu’on laisse mûrir sur pied à côté des territoires de chasse -, de lâchers de sangliers, qu’ils soient importés ou d’élevage ? L’absence de PV, si vous la confirmez, implique-t-elle pour autant l’absence d’infractions ? Répondre à cette question pose celle des moyens donnés pour la recherche des infractions, entre autres par l’UAB. Quels sont-ils ? Ou plutôt aujourd’hui que l’UAB a été ré-intégrée dans le DNF, quels sont les moyens dégagés pour lutter contre les grosses infractions en matière de chasse ? Quel est le plan d’action de l’administration ?

Une autre question est le contrôle de la destruction des dépouilles des sangliers infectés. Comment est il assuré ?

Enfin, il est évident que la réduction des surdensités s’impose ailleurs que dans le zone délimitée de 63.000 ha et qu’elle s’impose dans le futur à long terme. Qu’avez-vous pris comme décisions en la matière pour interdire le nourrissage et obliger la détermination de plans de tirs vérifiés pour les suidés, à l’instar des cervidés.

Je vous remercie de vos réponses,

Hélène Ryckmans

Compte-rendu temporaire de la séance du 1/10/2018 reprenant les divers échanges sur le sujet (à partir de la page 20 du document)

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