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Dans un avis cinglant sur l’avant-projet de loi réformant les quotas Inami, le Conseil d’État pointe le risque de recul d’offre médicale si les réalités territoriales ne sont pas intégrées dans les critères d’évaluation et de planification. Il pointe également l’atteinte à l’exercice des compétences des entités, dont la Wallonie en pénurie de médecins. Or, la Ministre de la Santé Maggie De Block (Open VLD) et le MR semblent se moquer du conseil d’État au détriment de la santé des citoyens

Au nom de l’accès aux soins, Ecolo s’était opposé à l’établissement de quotas dès 1996, ce qu’on appelait alors le numerus clausus fédéral. Depuis, selon la même logique d’accès aux soins, Ecolo appelle à la suppression des quotas Inami et à leur remplacement par une planification alternative de l’offre de soins, afin de corriger l’inadéquation entre l’offre et les besoins de la population. Les écologistes appellent en outre le Gouvernement Wallon à prendre ses responsabilités et à saisir le comité de concertation pour mettre fin à ce système injuste.

L’offre de soins médicaux, qu’il s’agisse des médecins généralistes ou des médecins spécialistes est en effet inadaptée aux besoins : il n’y a pas de répartition équilibrée entre les zones territoriales du pays, entre villes et communes rurales, entre les différents quartiers des grandes villes ; et il manque une complémentarité entre la première ligne de soins de proximité et les soins spécialisés en structures hospitalières. Les hôpitaux eux-mêmes ont des difficultés à recruter ou à conserver dans leurs services certaines disciplines de spécialistes tandis qu’on observe des surconsommations d’actes techniques dans d’autres disciplines.

« Je plaide auprès de la Ministre de la santé pour que la commission de planification intègre les observations des acteurs de terrains dans son évaluation des besoins en offre médicale mais le refus est systématique. Comme le Conseil d’Etat, nous refusons les uniques références à des statistiques de « X médecins par 10.000 habitants, » commente la députée fédérale Ecolo Muriel Gerkens. « Pourtant l’obstination aveugle et abusive des ‘preuves scientifiques et mathématiques’ ne peut supporter la confrontation aux réalités commune par commune.»

« De nombreux rapports et études, de l’OMS notamment, pointent les pénuries, et montrent qu’il existe un réel problème d’accès aux soins et d’équité entre les citoyens selon les lieux où ils résident, leur capacité à se déplacer ou leurs moyens financiers, » ajoute le député wallon Ecolo Philippe Henry. « Or, le système actuel continue de fixer des quotas, couplés à un numerus clausus limitant l’accès aux études de médecine. Certains étudiants belges choisissent même de terminer leur cursus dans un autre pays européen afin de revenir prester en Belgique en dehors des quotas. Sur les 1715 médecins ayant reçu l’agrément en 2015, 23 % détenaient un diplôme étranger. Ces situations sont incroyables ! On a également constaté les conséquences dramatiques de l’examen d’entrée tel qu’il a été organisé pour la première fois cette année. Il est urgent de revoir l’organisation des offres de soins et de mettre en place de nouveaux dispositifs,» poursuit Philippe Henry.

Concernant le système des quotas Inami, Ecolo a déposé une proposition de résolution à la Chambre visant à le remplacer. Pour les écologistes, la solution passe notamment par une évaluation territoriale des besoins en soins de santé et une planification de l’organisation des offres de soins de première ligne qui se base sur ces évaluations de terrain. Une même approche doit également être développée pour élaborer une offre territoriale de soins spécialisés en milieux hospitaliers.

Au niveau des études, les écologistes plaident pour une réorganisation complète des différentes filières d’école de la santé, en s’appuyant sur un tronc commun réel et une orientation bien plus progressive des étudiants tout au long de leur cursus. Et concernant les médecins en exercice, les écologistes pointent l’importance d’organiser une régulation territoriale de l’offre de soins qui se base sur une évaluation des besoins de la population.

« Il est impossible d’organiser une politique de santé conforme aux exigences de qualité, d’accessibilité et d’équité en s’obstinant dans le système actuel. L’approche par bassins de soin permet une meilleure répartition et plus de complémentarité dans les offres. Sachant qu’il faut au moins 10 à 15 ans pour former un médecin, l’inertie répétée du Gouvernement fédéral sacrifie non seulement toute une génération d’étudiants mais met à mal une politique de santé publique adaptée aux besoins. De son côté, le Gouvernement Wallon doit saisir le comité de concertation pour mettre fin à ce système injuste, » concluent Muriel Gerkens et Philippe Henry.