L’accompagnement sexuel des personnes handicapées est restée longtemps un sujet tabou, qu’il faut pourtant prendre en charge de manière ouverte, sans ouvrir la brèche à une légalisation de la prostitution organisée par les pouvoirs publics.
Le Parlement wallon a adopté un projet de résolution en vue d’élaborer un cadre légal clair. Elle prévoit la mise en place d’un groupe de travail de quelques parlementaires, qui travaillera avec le Cabinet de la ministre Greoli, accompagné de conseils de juristes.
Je m’inquiète surtout du cadre dans lequel ce groupe de travail va travailler dans la mesure où il se référera uniquement à l’avis n°74 du Comité consultatif bioéthique.
Ma demande de ne pas se cantonner à ce seul avis a été rejetée.
Or cet avis propose le recours à l’assistance sexuelle dans un cadre hors soin et contre rémunération.
On comprend très vite que cela pose problème.Les associations féministes, que le Comité bioéthique a refusé d’auditionner, ont d’ailleurs régulièrement fait part de leur crainte de voir l’accompagnement sexuel aboutir à la légalisation de certaines formes de prostitution.
Les signataires de la résolution se basent sur le fait que Belgique a ratifié en 2009 la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, pour réaffirme les droits dont jouissent les personnes en situation de handicap. Rappelons tout de même que la Belgique a également ratifié en 1965 la convention des Nations unies pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui. Ce faisant, la Belgique s’est engagée à lutter contre toutes les formes de proxénétisme, à soutenir les personnes prostituées dans leurs efforts de réinsertion et à mettre en place une politique de prévention de la prostitution.
Or, l’avis n°74 du Comité bioéthique ne fait jamais référence ni à la prostitution ni au proxénétisme. Or, il paraît peu crédible que l’octroi d’un agrément comme celui actuellement détenu par l’ASBL Aditi pour de l’assistance sexuelle n’entraîne pas l’installation d’autres prestataires sur le marché pour exercer le même type d’activité. La vente de services sexuels relève bien de la prostitution, quel que soit l’identité ou le statut particulier du client et peu importe que l’assistant sexuel exerce cette activité de façon principale ou occasionnelle.
De nombreuses associations féministes belges comme le Conseil francophone des femmes, l’Université des femmes et le Monde selon les femmes ont dénoncé le fait qu’il suffirait que les personnes rémunérées pour une pratique sexuelle ne soient plus étiquetées prostituées pour qu’il ne s’agisse plus de prostitution. Et n’oublions jamais que la prostitution reste un acte de violence.
Par ailleurs, j’ai dénoncé l’absence de retour au Parlement. Le groupe de travail viendra bien présenter un plan d’action au Parlement de Wallonie. Le sujet étant complexe, il me paraissait essentiel qu’au-delà d’une présentation, le travail soit soumis au Parlement. Cela a été refusé.
Raisons pour lesquelles je me suis, seule, abstenue lors du vote : répondre aux besoins des personnes en situation de handicap et trouver des moyens de leur permettre de vivre leur sexualité, oui, mais pas dans le cadre limité de l’avis du Comité bioéthique.
Hélène Ryckmans